Protection sociale complémentaire dans la fonction publique territoriale : enjeux clés au 1er janvier 2025
Le 1er janvier 2025 constitue une étape cruciale pour la fonction publique territoriale (FPT) en matière de protection sociale complémentaire (PSC). Cette date marque une tentative historique de réglementation plus équitable des garanties santé et prévoyance, dans un contexte politique et social où les attentes des agents publics se heurtent aux contraintes budgétaires des collectivités. Mais l'échéance du 1er janvier 2025 met aussi en lumière des incertitudes persistantes, notamment sur l’application des obligations liées à la prévoyance et leur impact sur les collectivités. Le décret n° 2022-581 du 20 avril 2022 impose aux employeurs publics une participation obligatoire à la garantie santé d'ici 2026. Cependant, l’accord national du 11 juillet 2023, signé par les représentants des employeurs publics et les organisations syndicales, qui devait structurer les dispositifs de prévoyance, n’a toujours pas été traduit en réglementation ou en législation. Cette absence de cadre juridique accroît l’incertitude et complique la mise en œuvre des réformes liées à la protection sociale complémentaire. Cet article propose une analyse des conséquences de cette absence de cadre clair et des obligations fluctuantes pour les employeurs territoriaux en termes de gestion des ressources humaines et budgétaires, une comparaison avec la fonction publique d’État (FPE), et une évaluation des défis réglementaires liés à la mise en œuvre des garanties santé et prévoyance.
L’article L. 827-1 du code général de la fonction publique, anciennement article 22 bis de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984, impose une contribution des employeurs publics à la PSC de leurs agents, mais la mise en œuvre concrète reste tributaire des décrets d’application. Le décret n° 2022-581 du 20 avril 2022 fixe une participation minimale de 50 % pour la garantie santé à compter de 2026, mais reste muet sur la question de la prévoyance.
Malgré la signature de l’accord du 11 juillet 2023, les dispositions qu'il contient n’ont pas encore été traduites en texte législatif ou réglementaire, ce qui empêche leur application effective. Ces blocages trouvent leur origine dans des divergences politiques concernant l’étendue des obligations à imposer, notamment sur la répartition des responsabilités entre l'État et les collectivités. De plus, des discussions prolongées sur les impacts financiers, tels que les coûts supplémentaires pour les budgets locaux et la charge administrative liée à la mise en place des dispositifs, ralentissent les décisions. Cette absence de cadre clair freine l’harmonisation des pratiques et laisse planer des incertitudes sur la mise en œuvre effective des dispositions prévues. Par conséquent, les collectivités territoriales ne sont pas juridiquement tenues de mettre en place un contrat collectif de prévoyance au 1er janvier 2025. Néanmoins, certaines collectivités, anticipant des contraintes futures et soucieuses d’éviter des ajustements brutaux, ont tout de même choisi de proposer à cette date des contrats collectifs à adhésion obligatoire, favorisant une transition plus fluide et sécurisant ainsi les agents face aux incertitudes.
Dans la FPE, l’accord interministériel majoritaire du 20 octobre 2023 a été transcrit par le décret n° 2024-678 du 4 juillet 2024. Ce texte rend obligatoire une participation de l’État employeur à hauteur de 50 % à compter du 1er janvier 2025, mais uniquement pour le risque santé, ce qui se traduit par une baisse des coûts pour les agents sur leurs cotisations santé tout en offrant une couverture uniforme sur l'ensemble du territoire.
En matière de garantie santé, la FPT et la FPE partagent des enjeux communs, notamment l’organisation des appels d’offres et l’adhésion obligatoire des agents. Cependant, dans la FPT, la garantie santé bénéficie d’une mise en œuvre plus avancée grâce au décret n° 2022-581 du 20 avril 2022. Ce texte réglementaire impose progressivement une participation obligatoire des employeurs, renforçant ainsi la protection des agents.
Dans la FPE, bien que l’uniformisation issue de l’accord interministériel facilite aussi la mise en œuvre de la garantie santé, elle présente cependant des limites. Par exemple, certaines administrations rencontrent des difficultés à intégrer des besoins spécifiques tels que des couvertures supplémentaires pour des populations à risque, ce qui crée des disparités dans l’accès aux soins. Une flexibilité réduite peut poser des problèmes pour adapter les dispositifs aux besoins réels. Cette différence met en évidence les avantages et inconvénients des deux approches.
Contrairement au risque santé, le risque prévoyance reste en dehors de toute obligation réglementaire immédiate dans la FPT comme dans la FPE. Si le décret n° 2024-678 du 4 juillet 2024 n’apporte aucune précision pour la FPE, la situation dans la FPT est encore plus floue, accentuant les inégalités potentielles entre les agents des deux versants.
Face à l’incertitude réglementaire, les employeurs territoriaux peuvent adopter une stratégie proactive pour anticiper les réformes. Ils pourraient, par exemple, engager dès maintenant des discussions avec les mutuelles et assureurs pour évaluer les options disponibles, tout en consultant leurs agents afin d’identifier leurs besoins spécifiques. Cette démarche leur permettrait de préparer un plan budgétaire adapté et d’éviter des ajustements abrupts à l’approche de 2026.